• SIRENES A BORD

    Couverture - Présentation video -  Quelques extraits  

    SIRENES A BORD 

    Un regard féminin, parfois humoristique, sur l'apprentissage de la voile et de la vie en bateau au long cours avec mari et enfants. Moments cocasses, expériences d'autres sirènes, pensées inspirées par la mer complètent ce récit.

    Présentation en video du livre par l'écrivaine

     

     

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    https://ancre-de-marine.oxatis.com/sirenes-a-bord-c2x38212155

     

    Quelques extraits :

    Extrait 1

    « Avec le recul, lorsque je me remémore les six années autour du monde, sur notre voilier Caredas, avec nos deux matelots de neuf et onze ans,  je me dis que nous avons tout même réalisé une sacrée « grande parenthèse ». 

    Pourtant, j’ai toujours considéré que ce que je vivais quotidiennement à bord de notre voilier, était tout à fait normal, quand bien même, certains de mes proches s’étonnaient de ma capacité à supporter, sans appréhension particulière, la vie de bateau au long cours.

    Mais, à tout bien considérer, je me suis trouvée, dans bien des situations, n’ayant aucun trait commun avec la « normalité », tout comme bien d’autres de mes congénères embarquées, bon gré mal gré, sur un bateau.

    J’ai d’ailleurs toujours été fascinée par la modestie et le fatalisme de ces femmes vivant à bord de bateaux de voyage. Elles débordent de créativité, d’ingéniosité et de courage. Elles ont accepté l’instabilité, au propre comme au figuré, de la vie de bateau et ont développé une faculté d’adaptation assez surprenante. Bon nombre d’entre elles m’ont largement inspirée et confortée dans mes choix.

    Voilà déjà quelques années que je collecte les histoires de femmes en mer, les plus singulières et je souhaitais leur rendre hommage. Voilà quelques années aussi que l’envie me taraude de coucher, enfin, sur le papier, les souvenirs de ce voyage que j’ai pris soin de bien ranger dans les tiroirs de mon esprit et qui me retombent régulièrement  dessus, en feuilletant un album photos, en visionnant quelques extraits de films ou en voyant partir d’autres familles pour leur grande aventure. Il devenait pour moi urgent, d’enfin prendre le temps de transcrire ce qui me reste de cette tranche de vie, qui est au fond l’essentiel de ce que j’ai vécu. Je n’ai, jusqu’ici, pas eu le temps d’écrire, trop occupée à vivre, sans doute et à mener à bien les nombreux autres projets que Cap’tain René et moi avons mis en œuvre.

    Le dernier d’entre eux nous a d’ailleurs amené à reprendre la mer, à deux, cette fois et sur un autre voilier, plus adapté à nos physionomies vieillissantes.                    Nous recommençons donc à tracer les pointillés de nos navigations sur le planisphère affiché dans le bureau et croiserons peut-être notre route entamée il y a plus de vingt ans.  Autant dire que le virus du nomadisme marin nous a repris et me permet de confirmer que j’aime vivre sur un bateau qui voyage. Mais en même temps, les singularités de ce mode de vie me sont apparues avec plus d’acuité et c’est par la lorgnette de l’humour que je me suis empressée de les immortaliser.

    D’autre part, si à mon tour,  je pouvais inspirer ou amener un élément de réponse aux sirènes qui se posent des questions sur la vie à bord d’un voilier, j’aurais tout gagné à m’être lancée dans ce récit !

     

    Mais commençons mon histoire sur la mer à son début.

    Extrait 2

    Moments de vie à bord : La gaffe

    « Définition Larousse

    gaffe , nom féminin, (déjà !) : Perche munie d'un croc pour accrocher.  

    Familier : Maladresse.

    Faire gaffe : locution familière qui signifie faire attention, prendre garde. »

    Ces trois définitions se rejoignent dans mon esprit quand j’utilise cet accessoire diabolique : « Sabine fais donc gaffe à la gaffe pour ne pas faire de gaffe »

     

    J’ai l’impression que ce sont souvent les femmes qui ont pour mission de manipuler l’engin récalcitrant. On les voit alors à l’œuvre à l’avant du bateau, en position instable, à l’endroit où le bateau est le plus haut sur l’eau et tangue le plus, pour crocher le corps-mort ou la bouée. Le capitaine manoeuvre le bateau sans visibilité et le plus souvent sous le vent de la bouée en commençant déjà à crier pour être mieux guidé. Quand enfin Madame pense être à portée de gaffe pour crocheter le corps-mort, il s’avère qu’il manque tout juste  dix centimètres pour réaliser l’exploit. Toute la manœuvre est alors à recommencer avec une tension nerveuse croissante.  Au second passage, Madame pense avoir gagné la partie, elle a réussi à passer le petit croc de la gaffe dans la boucle mouvante de la bouée et réalise alors qu’elle doit retenir, à bout de bras, les quelques tonnes du bateau qui part au vent, tout en réussissant à passer l’amarre dans la boucle, et à se débarrasser dans le même temps de la gaffe devenue subitement trop longue et dont le croc qui ne voulait pas passer dans la boucle, ne veut à présent plus en sortir ! Une seule parole déplacée du capitaine suffit alors à déclencher une crise de rage de la dame volontaire et persistante.Ma gaffe à moi est téléscopique, et elle « téléscope » toujours quand il ne faut pas. J’ai déjà essayé d’anticiper la traction en me positionnant au milieu du bateau ou même sur la plateforme arrière pour chopper l’anneau.  J’ai déjà essayé de procéder en étant couchée sur le pont pour être au plus près de la bouée, rien à  faire, l’exercice reste toujours aléatoire et la situation de la « gaffeuse » souvent humiliante. Aussi ai-je été ravie de trouver, au rayon gadget d’un salon nautique, celle que j’appelle « la gaffe magique ». C’est une gaffe téléscopique à laquelle se fixe un crochet. Il se clipse automatiquement sur l’anneau et est relié à un bout. C’est une opération 2 en 1. Après on double l’amarre tranquillement. Il existe maintenant plusieurs systèmes qui permettent de simplifier l’accroche d’un corps-mort. A mon avis, les concepteurs de matériel nautique ont dû avoir vent de plusieurs cas de divorce suite à des approches de bouées ratées. 

    Extrait 3

    Expérience de consoeur : Béa du bateau Chriod

     

    Béa naviguait avec Michel vers Panama, ils étaient en face de Haïti, la mer était  formée, une grosse houle soulevait  leur voilier « Chriod », ce qui n’empêchait pas leur estomac de crier famine. Béa se demandait ce qu’elle pourrait bien préparer à manger, elle interroge le capitaine qui est à la barre. Il lui signifie qu’au vu des conditions de mer difficiles, un repas simple, vite fait conviendra parfaitement.

    Simple, vite fait, c’est facile à dire, mais encore… Oh et puis zut, Béa, qui est italienne,  a envie de pâtes bien chaudes, elle sort la super cocotte-minute Lagostina offerte par sa maman  peu de temps auparavant, la remplit d’eau, la cale fermement sur la gazinière à cardans, y plonge les pâtes… et basta !

     

    Après quelques minutes, Michel passe la tête dans la descente et pose  la question que nous connaissons toutes : « Alors, qu’est-ce qu’on mange ? »

    -« J’ai pas d’autres idées, alors se seront des pasta ! »

    Il n’en fallait pas plus pour faire rugir Michel. Les ordres du capitaine n’ont pas été respectés !  Il avait dit simple ! C’est dangereux de faire bouillir de l’eau ! Il y a refus d’obtempérer ! La tension monte en même temps que la pression dans la cocotte-minute. Béa excédée, retire la cocotte du feu, la tend à Michel et lui signale que s’il n’est pas content il n’a qu’à jeter les pâtes à la mer. Ni une ni deux, Michel empoigne la cocotte et la balance toute entière par-dessus le bastingage.

    La « ferrari » des cocottes-minute à la mer ! Un cadeau de maman ! Béa est époustouflée par la réaction de Michel. Elle ne s’en remet pas, elle sent la rage monter, elle voudrait débarquer séant pour ne plus voir le capitaine, mais au milieu de la mer des Caraïbes, rien de plus difficile. Elle part à l’avant du bateau, se cale contre l’étai de génois, ça bouge mais tant pis, elle boude ! Et elle continuera à bouder une bonne partie de la nuit malgré les appels désespérés de Michel pour la faire revenir dans le cockpit.

    Cet épisode aura certainement été la plus grave dispute de leur long voyage. Cela ne les a pas empêchés de se marier aux Marquises, et de voyager sur leur voilier pendant trente ans ! Ce qu’ils ont retenu de l’histoire,c’est qu’en bateau mieux vaut éviter d’en arriver aux extrêmes, car une situation de dispute peut rapidement virer au drame, il faut pouvoir compter l’un sur l’autre à tout moment,  quitte à régler les contentieux une fois à quai, et se faire offrir une nouvelle cocotte-minute !

     

    Car si ce ne sont pas les tempêtes et les conditions difficiles de navigation qui mettent à mal la concrétisation d’un projet ce sont les disputes et les désaccords au sein de l’équipage qui risquent de faire capoter les plus belles histoires.